Pages

Littérature pour conjurer le trouble, le vertige de cette explosion ! oui !! virtuellement infinie d'images, (nous sommes tous des crapules) pour retrouver un fil conducteur (Ariane!--Au secours !!) dans ce labyrinthe de nos défaites. Que la fête à venir ne soit pas pour oublier le mal mais pour illustrer nos victoires ! ... P.S. : Je vous aime !

Voyelles

A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu : voyelles
Je dirai quelque jour vos naissances latentes :
A, noir corset velu des mouches éclatantes
Qui bombinent autour des puanteurs cruelles,

Golfes d'ombre ; E, candeurs des vapeurs et des tentes,
Lances des glaciers fiers, rois blancs, frissons d'ombrelles ;
I, pourpres, sang craché, rire des lèvres belles
Dans la colère ou les ivresses pénitentes ;

U, cycles, vibrements divins des mers virides,
Paix des pâtis semés d'animaux, paix des rides
Que l'alchimie imprime aux grands fronts studieux ;

O, suprême Clairon plein des strideurs étranges,
Silences traversés des Mondes et des Anges :
- O l'Oméga, rayon violet de Ses Yeux !
Rimbaud, Arthur

dimanche 28 juin 2009

Heidegger

Heidegger, ce "grand penseur", est aussi et peut-être plus essentiellement, un grand sensitif. C'est-à-dire plus déjà qu'un être très sensible. Il sentait et voyait venir les choses de loin. Mais il a eu... nous ne disons pas la chance : le destin de vivre quelque chose d'exceptionnel : une époque. Et quelle époque ! Celle des décisions radicales et des tentatives marquantes.

Nous n'aurions pas eu le même Heidegger sans le nazisme. Meilleur, pire ? C'est à chercher dans les univers parallèles... autant dire : je ne sais pas. Grand destin, petits effets. Heidegger, remarquable professeur, apprend à lire et à penser. Mais il se cache et ne permet pas d'accéder à la décision.

Sartre disait quelque part (dans la revue Combat, en 1946 -trouver la référence exacte-) que Heidegger manquait de caractère. Il voulait dire, sans doute (il faudrait retrouver le contexte), de courage physique. Parce qu'il n'osa pas s'opposer explicitement, à la machine en effet implacable, effroyable. Ce qui aurait été de s'offrir en sacrifice, clairement.

Mais Sartre, lui, ne manquait pas de caractère. Peut-être un peu plus de discrétion... Heidegger sut, dut, pour sauver sa peau, pour survivre et passer au travers des années de plomb puis de l'écrasement complet de l'Allemagne sous les bombes, et les famines, détresses qui s'ensuivirent, ruser.

Sans doute une grande part de la stratégie institutionnelle et intellectuelle de monsieur Martin Heidegger a eu pour motif, toutes antennes dehors, de le mettre à l'abri de la menace physique et même pire, que faisait sur lui peser le massacre.

Avait-il le choix ? Bonne question. Comparativement Sartre est une grande gueule et il n'aurait pas fait long feu, disons, à sa place. La place est importante, et le temps, et l'époque, en plus de la dis-position : caractère, humeurs, dispositions : stimmung.

Il fallait un esprit en retrait, qui survive, appréhende et rende compte, contourne et dépasse le phénomène exorbitant du fascisme nazi, un modèle du genre qui de cesse d'inspirer des épigones. Un univers de complicités... savoir, ne pas savoir ; l'intelligence devine. La décision dans l'action est un pari. D'une manière ou d'une autre, les effectifs seront détruits : Life finds a way mais par des chemins détournés.


Le nom d'Allah et le Coran est un gros pari levé sur la langue arabe. Heidegger, lui, parie sur l'allemand. Il ne concède que du bout des lèvres qu'il soit possible, aussi, de penser en français. Mais une grande partie de son œuvre s'arcboute contre le rayonnement de la latinité. Nous allons étudier, voir, suivre ce pari.

Aucun commentaire: